Les pratiques instrumentales de la musique sacrée portugaise dans son contexte ibérique. XVIe-XVIIe siècles. le ms. 1 du fond Manuel Joaquim (Coimbra)

Abstract

(INTRODUCTION)

Un point de depart: la question de l'a cappella

La Musicologie, comme toutes les sciences récentes, est bâtie sur une pluridisciplinarité qui peut comprendre l'analyse des techniques musicales, l'étude paléographique. (musicale. Et littéraire), l'histoire. des civililations, l'histoire de l'art, l'étude littéraire, l'iconographie et même l'architecture. Le croisement de toutes ces perspectives permet. de dessiner une histoire de la Musique qui essaye non seulement de dégager une liste chronologique d'œuvres ct d'auteurs, mais également de déceler l'environnement social, économique et politique qui conditionne la création de chaque moment musical. Cette démarche multidisciplinaire est d'autant plus importante quand l'étude. porte sur les pratiques interprétatves de jadis. En effet, le monde artistique connaît., en particulier à partir de la seconde moitié du XXe siècle, un mouvement de redécou verte des trésors musicaux d'anta.n, régi par des principes interprétatifs qui obéissent à un idéal d'authenticité, c'est-à-dire, ce que l'on a cru, à différents moments de l’histoire, être le jeu musical de nos ancêtres. Or, précisément, la conception de ce qu 'ont pu être les pratiques interprétatives d'autrefois connaît des revirements au fur et à mesure que la. recherche mnusicologique avance. Le. répertoire. sacré est parmi les primiers à faire l'objet dr. cette quête musicale car il est., pendant. une bonne partie de l'histoire de la musique, le seul à se présenter sur un suppor t écrit. Sa création et. sa prat.ique ont lieu dans les principaux centres d'érudition de l'êpoque, les institutions ecclésiastiques et notamment les cathédrales. Voyons donc commnent la pensée rnusicologique, résultat. de l'intersection de différentes disciplines, évolue, dès le XIXe siècle, au sujet de l'idéal interprétatif de la musique sacrée ancienne, en particulier, sur la question de l'a ca.ppella, c'est. à dire, de savoir si son exécut.ion doit ou non comprendre une participation instrumentale. La, musicologie connaît essentiellement trois stades bien distincts en matière de questionnement sur la question de la participation instrumentale dans la musique sacrée: tout d’abord, l'établissement d'une doctrine a cappella durant le XIXe siècle; puis, pendant la première moitié du XXe siècle, une réaction à cette doctrine a cappella; et, vers 1960, le retour à une pratique a cappella aprés une démarche plus scicntifique, axée sur des recherches iconographiques et des archives. La religiosité romantique du XIXe siècle, incarnée dans des mouvements comme celui des Ceciliens, cherche le renouvellement de la musique de l'Église. "Les jugements négatifs fusent à l'égard de la musique sacrée telle qu'elle est pratiquée en Italie durant le XVIIIe siècle. Avant d'être critiques, ces dénigrements sont d'abord réactionnaires" . Les qualités accordées au plainchant (considéré comme la 'vraie' musique de l'Église), - sa simplicité, sa clarté et la tranquillité' apportre -, sont retrouvées dans la polyphonie vocale 'classique', non accompagnée, des compositeurs de la fin du XVc et du XVIe siècles. "[Les] polyphonies de la Renaissance [ont] un sens d'expérience religieuse dont nulle autre musique si ce n'est celle de Bach ou Haendel ne peut. se prôvaloir". Le XIX siècle connaît. ainsi un nombre croissant concerts et d'éditions musicales préconisant un idéal d'exécution de la musique religieuse sans l'interférence 'troublante' de l'instrument musical . C'est la naissance d'une doctrine a cappdla qui reste présente dans le raisonnement musieologique pratiquement jusqu’à nos jours...